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Robert Jordan, la fantasy version extra large

Par Florian Besson

Avec la saga La Roue du temps, Robert Jordan a créé une œuvre aux proportions colossales, aujourd’hui reconnue pour sa profondeur. S’il s’est beaucoup inspiré de textes classiques, l’auteur a aussi pioché dans l’œuvre de Tolkien.

Corps

Une saga gigantesque

Avec ses quatorze tomes (quinze en comptant le prequel) et ses vingt-trois années de publication, La Roue du temps (Robert Jordan, 1990-2013) s'impose d'abord comme l'une des sagas les plus vastes de la fantasy. Tellement, à vrai dire, qu'elle dût être achevée par Brandon Sanderson, Robert Jordan étant décédé en 2007, peu après la parution du onzième tome. Totalisant environ 80 millions d'exemplaires vendus dans plus d'une trentaine de langues, elle a également donné naissance à un jeu de rôle, à un jeu de société et devrait sous peu être adaptée sous la forme d'une série télé produite par le géant Amazon.

La Roue du temps, illustration de Sam Weber d'après l’œuvre de Robert Jordan (2015) Sam Weber http://sampaints.com/2013/09/04/the-wheel-of-time/

L'histoire suit le parcours de trois jeunes villageois : Matrim Cauthon, Perrin Aybara et Rand al'Thor. Ce dernier s'avère être le Dragon Réincarné, une figure d'élu chargé de mener la lutte contre le Ténébreux, puissance maléfique emprisonnée sous une montagne au nord du monde. Magicien puissant, Rand sombre progressivement dans la folie, tout en essayant d'unifier un monde politiquement divisé, et de remporter la Tarmon Gai'don, l'ultime bataille entre le bien et le mal.

Un chef-d’œuvre de la fantasy

Au fil des tomes, le nombre de personnages se multiplie pléthoriquement : la saga embrasse des centaines de protagonistes, principaux ou secondaires, insérés dans des sous-intrigues complexes, tant politiques que personnelles. L'attention portée par Robert Jordan aux conflits politiques et géopolitiques, sa description précise et détaillée d'un système de magie cohérent, l'inventivité dont il fait preuve pour créer des structures sociales originales, ou encore la place donnée à de mémorables personnages féminins – dont Egwene, Elayne ou encore Aviendha –, figurent parmi les raisons expliquant l'énorme succès éditorial de la saga et la place qu'elle occupe encore aujourd'hui dans le panthéon des œuvres de fantasy.

Vue de la vallée de Thakan'dar, illustration de Paul Bielaczyc d'après l'œuvre de Robert Jordan (2015) Paul Bielaczyc https://www.aradanicostumes.com/products/the-last-battle?variant=47737290261

De Tolkien à Jordan, une filiation évidente

Bien que Robert Jordan puise ses thèmes à de nombreuses sources, depuis La Bible jusqu'aux récits hindous, en passant par Guerre et Paix (Léon Tolstoï, 1865-1869), la filiation avec l'œuvre de J.R.R Tolkien est évidente, ne serait-ce que dans la structure des deux premiers tomes. Ici, de jeunes gens innocents doivent fuir leur paisible village de campagne pour lutter contre un maléfique et mystérieux « seigneur du mal ». Les clins d'œil peuvent se faire plus appuyés, à l’image des terrifiants Myrddraals, qui sont très proches des Nazgûl du Seigneur des Anneaux dans leur apparence de cavaliers noirs. Des dires mêmes de l'auteur, il s'agissait de reprendre délibérément un paysage narratif familier des lecteurs et lectrices, pour ensuite les amener vers d'autres voies.

 

Robert Jordan emprunte également à la mythologie arthurienne, avec le personnage d'Artur Paendrag Tanreall, légendaire roi du passé qui avait réussi à unifier l'ensemble du continent, ou encore avec l'île de Tar Valon, avatar de l'Avalon médiévale, lieu de formation des Aes Sedai, elles-mêmes reprises du peuple des Aes Sidhe de la mythologie celtique.

Armes d'Arthur Pendragon teste de dragon, Armorial des chevaliers de la Table ronde (1485-1495) Bibliothèque nationale de France