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Les sous-genres de la fantasy, un vaste monde à découvrir

Par Anne Besson

High, low, light… Nombreux sont les sous-genres qui définissent la fantasy. Qu’il s’agisse d’œuvres lointaines et merveilleuses, ou d’œuvres noires et apocalyptiques, découvrez ce que cache ce genre décidément pléthorique.

Corps

Une profusion de sous-genres

La fantasy couvre un domaine très vaste des productions de l’imaginaire, à plus forte raison en anglais, où elle inclut ce qu’en France nous nommons le fantastique. Derrière les marqueurs les plus familiers (des elfes, des dragons, des royaumes…), une profusion de sous-genres se sont développés au fil du temps. À la fois points de repère nécessaires pour les aficionados qui aiment à retrouver leurs références favorites d’une œuvre à l’autre, et outils marketing pour accroître la visibilité des produits culturels, les sous-genres de la fantasy sont l’objet de débats souvent passionnés entre amateurs, leurs frontières étant par essence poreuses et leurs définitions évoluant dans le temps et dans l’espace. Les genres, servant à "mettre un nom" sur un ensemble de caractéristiques, s’adaptent en effet aux corpus existants à un moment donné.

1997
Année de parution du tome I de Harry Potter, l'une des grandes œuvres de la low fantasy.

High et low fantasy

Une première grande distinction oppose high et low fantasy (fantasy "haute" et "basse"), sans que cette "échelle" ne recoupe a priori de jugement de valeur. Le visage le mieux connu de la fantasy, celui des grands succès inspirés des mondes et nobles quêtes de Tolkien, relève de la high fantasy. À l’inverse, la low fantasy se situe tout près de nous – comme dans Harry Potter (J. K. Rowling, 1997-2007), où le monde des sorciers coexiste secrètement avec celui des moldus, ou encore dans la série télévisée Buffy contre les Vampires (Joss Whedon, 1997-2003) où une porte des enfers s’ouvre sous la petite ville de Sunnydale.

 

Nous sommes ici aux frontières du fantastique, et l’hybridité constitutive de la fantasy s’accentue avec l’introduction d’autres codes génériques, comme ceux du roman sentimental pour constituer la "romance paranormale" (ainsi, entre de nombreux autres exemples, les romans de la série Mercy Thompson de Patricia Briggs, à partir de 2006).

Buffy contre les vampires, série écrite et réalisée par Joss Whedon (1997-2001) 20th Century Fox

Quels critères de définition ?

Les catégories génériques sont donc nombreuses, concurrentes entre elles et se recoupant en partie tout en ne reposant pas toujours sur les mêmes critères. Il peut s'agir de thèmes privilégiés, comme dans l’urban fantasy, caractérisée par le décor de la grande ville, qui sous-entend donc souvent un ancrage dans le monde contemporain, proche du réalisme magique. Charles de Lint et son cycle de Newford (à partir de 1990) en est l’un des grand représentant, tout comme Megan Lindholm – alias Robin Hobb – avec son Dernier magicien (1986). On trouve également des influences remarquables, par exemple pour la "fantasy antique", ou plus largement la "fantasy historique", qui revisite une période bien précise en y introduisant des éléments de merveilleux. C’est le cas du français Pierre Pevel avec la Guerre de Trente Ans, dans la trilogie Wielstadt (2001-2004), ou du canadien Guy Gavriel Kay avec l’empire byzantin dans La Mosaïque de Sarance (1998-2000).

 

On peut en rapprocher la fantasy "néo-victorienne", proche du mouvement steampunk, qui réinvente le XIXe siècle victorien à coup de technologies alternatives (vapeur, éther, esprits…), de créatures fabuleuses (vampires, fées, loups-garous…) et d’intertextualité (Jules Verne, Charles Dickens, Oscar Wilde, Lewis Carroll…). La série littéraire Le Protectorat de l’Ombrelle (Gail Carriger, 2009-2012), Le Cirque des rêves (Erin Morgenstern, 2011) ou les Mémoires de Lady Trent (Marie Brennan, 2013-2017) en sont de bons exemples.

 

Enfin, on peut aussi parler de  tonalités, avec la "light fantasy", axée sur l’humour et dont Terry Pratchett est le grand représentant, ou à l’inverse la "dark fantasy", toute proche de l’horreur. Celle-ci couvre un vaste territoire qui va du cycle La Tour Sombre de Stephen King (1982-2012), où converge toute l’œuvre de ce maître du fantastique, à la série des Joyaux Noirs (1998-2010) d’Anne Bishop, dont les personnages sont de séduisants démons et sorcières. Sous-genre aux ambiances également sombres, la "gritty fantasy" (fantasy rugueuse, râpeuse) dite encore "grimdark" (fantasy sinistre) peut revendiquer Glen Cook et sa Compagnie noire (1984-2000) comme précurseur et George R. R. Martin comme chef de file contemporain, aux cotés de Joe Abercrombie ou Mark Lawrence. Son pessimisme moral tranche avec ce qu’on connait le plus souvent du merveilleux en fantasy, et se traduit par des personnages ambivalents, une moindre présence de la magie au profit de stratagèmes politiques, et une violence sanglante.

La Trilogie de Wielstadt, L'intégrale, de Pierre Pevel (2011) Éditions Pocket, 2011
Les Annales de la Compagnie Noire, L'intégrale, 3 de Glen Cook (2016) Éditions J’ai lu, 2016