Le Seigneur des Anneaux de Peter Jackson
Pas facile d’adapter l’œuvre centrale de Tolkien. À partir de 2001, Peter Jackson réussit à relever le défi, exploitant aussi bien les magnifiques paysages de la Nouvelle-Zélande, que les nouvelles technologies d'animation en motion capture.
Une adaptation réussie
Les amateurs de l’œuvre écrite ont d’abord voulu y voir un coup de projecteur bienvenu sur leur auteur favori. Tolkien avait cédé les droits audiovisuels sur son œuvre dès 1969 à la compagnie United Artists, mais les tentatives d’adaptation antérieures du Seigneur des Anneaux – qu’il s’agisse du projet porté par les Beatles ou de la version animée par Ralph Bakshi qui s’arrête en 1978 après un unique premier volet – n’avaient pas abouti faute d’une technologie à la hauteur, et en raison des difficultés évidentes à résumer l’ampleur du roman de Tolkien.
Peter Jackson s’est assuré de pouvoir tourner trois longs films, et avec Fran Walsh et Philippa Boyens, il écrit un scénario qui restitue l’essentiel de l’ouvrage – le personnage de Tom Bombadil est laissé de côté, tandis que celui d’Arwen, relégué chez Tolkien dans les annexes, est nettement développé. Cofondateur d’une société d’effets spéciaux, Weta Digital, il choisit les paysages naturels préservés de sa Nouvelle-Zélande natale, pour associer excellence technologique (l’animation du personnage de Gollum en motion capture) et effet de réel. Il s’entoure notamment d’Alan Lee et John Howe, les illustrateurs tolkiéniens les plus talentueux de leur génération et transcrit leurs visions de la Comté, de Fondcombe ou de la Moria dans des scènes mémorables.
Un bilan en demi-teinte
Ce Seigneur des Anneaux par Jackson n’en demeure pas moins une interprétation de l’œuvre parmi bien d’autres possibles. Elle finit d’entériner sa postérité au fil de décennies d’histoire de la fantasy – tournée vers l’action et le public des "jeunes adultes", nourrie d’images de la bande dessinée et des figurines de jeux de rôle.
Si le monde de Tolkien entre dans une autre dimension, au passage il se trouve déformé, d’autant que beaucoup de spectateurs ont le sentiment de connaître Le Seigneur des Anneaux sans avoir lu le livre, ou s’avouent surpris, voire déçus quand ils s’y essaient : ils découvrent alors une œuvre exigeante, plus longue et contemplative, au style noble et descriptif. Le traitement subi par Le Hobbit (2012-2014) n’a bien sûr rien arrangé : son adaptation en trilogie, longtemps retardée, est beaucoup plus libre et critiquable.
Il n'en reste pas moins qu'il existe désormais plusieurs façons d’appréhender la Terre du Milieu, par la seule œuvre écrite ou via l’univers élargi suscité par les films.