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Focus Œuvre

Peter Pan, le garçon qui ne voulait pas grandir

Par Anne Besson

Réflexion sur le refus du temps et véritable hymne à l’imagination des enfants, le roman de J.M. Barrie continue d’inspirer les amateurs de fantasy, enfants ou adultes, plus d'un siècle après sa parution.

Corps
1911
Après plusieurs écrits, Peter Pan a son roman.

Un héros, plusieurs textes

James Matthew Barrie (1860-1937) demeure connu comme le créateur du personnage de Peter Pan, auquel il a consacré une série de textes au tournant du siècle, inspirés par ses jeux avec une fratrie de jeunes garçons, la famille Llewellyn-Davies. Barrie leur consacre un album photographique en 1901, The Boy Castaways of Black Lake Island, avant d’immortaliser son héros par une célèbre statue érigée en 1912 sur les lieux de leur rencontre : les jardins de Kensington à Londres.

 

Le premier texte publié introduisant le personnage de Peter Pan est un roman destiné aux adultes, Le Petit Oiseau blanc, en 1902. Les chapitres où apparaît le personnage feront ensuite l’objet d’une parution en "beau livre", illustré par Arthur Rackham, Peter Pan dans les jardins de Kensington (1906). Entre-temps, il y eu l’énorme succès remporté auprès des familles londoniennes par la spectaculaire pantomime théâtrale Peter Pan ou le garçon qui ne voulait pas grandir (décembre 1904), puis par le roman que Barrie tire en 1911 de la même matière narrative, Peter et Wendy, plus connu aujourd’hui sous le titre Peter Pan.

Peter Pan dans les jardins de Kensington, de J. M. Barrie,
illustré par Arthur Arthur Rackham (1907) Bibliothèque nationale de France

Un hymne à l'imagination des enfants

Les aventures de Peter Pan sont explicitement une réflexion sur le refus du temps qui passe et un hymne à l’imagination des enfants, décrits comme "gais, innocents et sans cœur". L’existence même des fées, petits être ailés comme la fameuse Clochette, est suspendue à leur capacité à croire, qui disparaît à l’âge adulte. Peter, séduisant, insolent, rejette le monde des parents, des contraintes et des responsabilités pour régner sur les garçons perdus dans un "Neverland" - souvent traduit en "Pays imaginaire" en français -, où fusionnent en un même espace (une île, bien sûr) les lieux favoris des jeux enfantins. Dans ce pays coexistent des pirates, des indiens et des sirènes. Joueur de flûte, Peter entraîne avec lui les enfants Darling, qui abandonnent leur nursery pour partager ses aventures. Le capitaine Crochet fuit le passage du temps sous la forme d’un crocodile qui fait "tic-tac".

 

Peter Pan bien sûr porte un rêve (inquiétant) d’enfance éternelle, mais Wendy et ses frères repartiront vers le flux de la vie ; après que leurs parents les ont cru morts, ils vont grandir. Le roman de 1911 se ferme sur l’évocation des futurs enfants de Wendy, qui à leur tour… N’en disons pas plus !

Moi, Peter Pan, de Michael Roch,
illustré par Aurélien Police (2019) Éditions Gallimard Folio SF

Un personnage toujours très présent

Peter Pan est devenu un mythe culturel. Porteur de résonances psychologiques profondes, son nom est désormais attaché au "syndrôme de Peter Pan", qui désigne le désir, chez certains hommes en particulier, de ne pas quitter l’enfance. Nombre d’artistes ont pourtant imaginé le garçon éternel sorti du refuge de l’imaginaire : enfant perdu dans un Londres victorien très sombre pour Régis Loisel, dans sa bande dessinée Peter Pan en 6 tomes (1990-2004), ou bien devenu grand pour Steven Spielberg dans son film Hook (1991). Le pouvoir des images a toujours accompagné le héros vêtu de vert, depuis le film de 1924 Peter Pan, réalisé par Herbert Brenon, très fidèle aux visions de Barrie, jusqu’au Pan de Joe Wright, qui lui invente des aventures épiques (2015), en passant par le film de P. J. Hogan (2003), et surtout le dessin animé Disney (1953), à l’influence décisive dans la mémoire collective.

Londres, Peter Pan, 1, roman graphique écrit et illustré par Régis Loisel
d'après l'œuvre de J.M. Barrie (2012) Vents d'Ouest/ Éditions Glénat, 2012